

Rose-Marie Mariaca Fellmann
L'unebévue 2014 / ISBN n°978-2-914596-44-2 / 160 p. / 20€.
Traduit de l'espagnol par Annick Allaigre
Préface Marie-France Basquin

Le 8 mai 1984 un caporal militaire de 25 ans, lourdement armé, fait irruption à l'Assemblée Nationale du Québec où il tue trois personnes et en blesse treize autres. La veille, Lortie avait enregistré trois cassettes, une à son épouse Lise Levesque, une au Colonel Arsenault des Forces Armées, et la troisième à un animateur de radio, André Arthur et qui se terminait par : « Alors, je te le demande encore une fois, avant de te quitter, publie cette cassette si t'as du cran. Si tu as autant de cran que moi, publie-là la cassette au complet. Mais ne me juge point et dis au monde qu'ils me donnent pas de surnom, de nick-name, le fou, whatever... »
Rose-Marie Mariaca Fellmann a attentivement écouté ces enregis-trements, elle a soigneusement fait une transcription qui respecte les particularités des paroles de Lortie, hésitations, mélanges, erreurs, anglais, français, québécois...
« ... Ceux-là qui écoutent présentement la cassette, peut-être que vous allez... peut-être une personne qui va écouter cette cassette, peut-être deux, peut-être cent, peut-être cinquante, mais je vais vous le dire. Ce que je dis, je le dis, ça n'a pas été pensé d'avance, ça n'a pas été écrit nulle part. Personne n'y a pensé, seulement moi. Essayez pas de faire sortir des millions pour faire passer des psychologues, essayer de voir des spécialistes pour savoir ce qui s'est passé avec moi. Gaspillez pas d'argent pour rien.
Je le fais parce que je détruis un parlem, hé? hein? un parti politique qui fait mal à la langue française. Alors, vous peut-être qui parlez anglais, qui va traduire ça en anglais pour moi, alors je vous le demande : ne virez pas tout à l'envers. Traduisez pas tout à l'envers du français à l'anglais... Je veux détruire quelque chose qui veut détruire la langue. Je le fais parce que je détruis un parti politique qui fait mal à la langue française. »
L'unebévue 2013 / ISBN n°978-2-914596-39-8 / 288 p. / 20 euros.
avec les communications de
RENÉ DE CECCATTY ISABELLE CHÂTELET STÉPHANE NADAUD SUSANA BERCOVICH STELIOS SARDELAS FRANÇOISE JANDROT CATHERINE LORD DENIS PETIT MAYETTE VILTARD JEAN ALLOUCH ALICIA LARRAMENDY FELIPE BRUNO MARTINS FERNANDES COLETTE PIQUET DAVID HALPERIN

Quatrième de couverture :
« Pour moi, ce type était un putain de saint ». Le putain de saint en question est Michel Foucault. Le type qui a écrit la phrase est David Halperin, dans son livre Saint Foucault : Towards a Gay Hagiography. « La béatification de Foucault par Halperin est une absurdité réfléchie », dit Catherine Lord, « à la fois une éviscération de l'homophobie et une ode à la fabrication d'un moi queer ». Elle ajoute : « On ne devient pas un saint sans réaliser un miracle ou deux. L'histoire de la sexualité de Foucault fut à l'époque la plus grande source intellectuelle d'inspiration des militants de la lutte contre le sida. »Le combat pour avoir le dernier mot dans l'interprétation et le contrôle de la représentation, inhérent à la situation biographique en général, prend une dimension politique irréductible quand il s'agit d'une vie gaie. Tout en tenant qu'à partir du XIXe siècle, la description devient une des technologies politiques d'examen produisant des corps dociles, et des cas, Foucault a évoqué le « grondement de la bataille ». Celle des anormaux, dont les « récits de vie », sous toutes leurs formes artistiques, ne sont pas des psychobiographies mais des faits d'écriture, de création, points intenses des vies infâmes, sources de lignes de fractures, de collisions, d'inventions. Celle également des « récits de soi », des pratiques des arts de l'existence, peut-être porteuses d'une nouvelle subjectivité.
« Les mutations du capitalisme ne trouvent-elles pas un vis-à-vis inattendu dans la lente émergence d'un nouveau Soi comme foyer de résistance ? » questionne Deleuze.
Faire de sa vie une œuvre éclatante…
Oriane d'Ontalgie
L'unebévue 2012 / ISBN n°978-2-914596-35-0 / 121 p. / 10€.

Heidegger a parcouru un "chemin de pensée" allant par un "tournant" de Husserl à Hölderlin en passant par "l'Être", "le Temps" et la "Vérité", "la Différence ontologique", le Dasein et l'Ereignis, mais aussi "le peuple" et "l'État".
L'étude rigoureuse du tracé de ce chemin, considéré ici à la loupe, conduit à voir que l'apologie gnoséologique de la haine, la nazification de la "Différence ontologique", l'enrôlement de Hölderlin, la sécularisation de Kierkegaard, et autres dérapages, sont subordonnés à la déification de "l'Être", qui est le tour de bonneteau dominant l'oeuvre de Heideggger et qui fait de "l'Être" un Dieu pour athée incohérent.
Ce chemin conduit-il à un temple grec, à un château de cartes, ou bien à un plus sinistre théâtre d'ombres dont le régisseur a fini par se prendre au spectacle jusqu'à y croire lui-même ?
José Attal
L'unebévue 2012 / ISBN n°978-2-914596-37-4 / 96 p. / 20€.

Un des grands intérêts du présent ouvrage tient en l'indication qu'en novembre 1973, il s'est passé quelque chose de particulièrement remarquable à l'endroit de la supposée transmissibilité de la psychanalyse, ce que José Attal ne recule pas à qualifier de « nouveau départ ».
Les deux premières Propositions d'octobre 67 sur le psychanalyste de l'Ecole, qui étaient censées régler cette transmission, s'avèrent être antithétiques l'une l'autre, et apparaît, formulée en 1973, ce qu'il faut bien nommer héraclitéennement, une troisième Proposition d'octobre 67. Lacan n'hésite pas à s'autodéterritorialiser, les énoncés canoniques du lacanisme qui organisaient la Proposition d'octobre sont déplacés, subvertis, voire déclarés caduques sur de nombreux points, chaîne signifiante, temps logique, etc. et la formule « l'analyste ne s'autorise que de lui-même », jugée accablante, se transforme.
La passe devient un agencement de production mutante de subjectivité, à saisir diagrammatiquement, et la psychanalyse, déclarée intransmissible par Lacan, peut trouver les conditions de sa réinvention par chaque analyste. Il s’agit alors de penser dans des coordonnées différentes la question : « qu'est-ce que témoigner ? »
David Halperin traduction Isabelle Châtelet
L'unebévue 2011 / ISBN n°978-2-914596 / 90 p. / 20€.

La parution du livre de David Halperin Saint Foucault, Towards a Gay Hagiography fut un événement aux États-Unis. Inédite en français, sa troisième partie La vie descriptible de Michel Foucault vient compléter Saint Foucault publié aux éditions EPEL. Foucault l'avait écrit : « les procédés disciplinaires […] abaissent le seuil de l'individualité descriptible et font de cette description un moyen de contrôle et une méthode de domination. […] Et cette descriptibilité nouvelle est d'autant plus marquée que l'encadrement disciplinaire est strict : l'enfant, le malade, le fou, le condamné deviendront, de plus en plus facilement à partir du XVIIIe siècle et selon une pente qui est celle des mécanismes de discipline, l'objet de descriptions individuelles et de récits biographiques. Cette mise en écriture des existences réelles n'est plus une procédure d'héroïsation ; elle fonctionne comme procédure d'objectivation et d'assujettissement ». En soulignant qu'il n'y a rien de personnel dans la subjectivité, Halperin replace la « mise en écriture »
d'une existence déviante dans l'arène politique et tire de la biographisation de Foucault une leçon des effets de pouvoir sur tous ceux – le délinquant, le pervers, le pauvre, la personne de couleur, la femme – que la société moderne peut qualifier d'anormaux.
David Halperin est titulaire de la chaire W. H. Auden d'Histoire et de Théorie de la sexualité à l'Université du Michigan à Ann Arbor. Il est le cofondateur de la revue GLQ, Gay and Lesbian Questions et auteur de nombreux travaux, comme Cent ans d'homosexualité et autres essais sur l'amour grec (EPEL), Oublier Foucault, mode d'emploi (EPEL), ou Que veulent les gays ? Essai sur le sexe, le risque et la subjectivité (Amsterdam).
Illustration de couverture : Catherine Lord
Herbert Graf
L'unebévue 2011 / ISBN n°978-2-91-459 / 220 p p. / 20 €.

« La thèse du petit Hans enfin publiée » ! Voilà qui aurait fait un titre plus évocateur. Mais justement ! Pourquoi en France « le petit Hans », ce personnage des textes de Freud, est-il bien plus connu que Herbert Graf, le metteur en scène d'opéras ? Prendrait-on un des « Cinq cas de psychanalyse » pour le récit biographique d'un enfant viennois des années 1900 ?
Le petit Hans est un cas d'école, un texte qui enseigne comment Freud se situait dans le transfert, et non pas comment l'enfant Herbert Graf a vécu les circonstances qui ont précipité ses manifestations phobiques. Encore moins quelle expérience il a ultérieurement tirée d'avoir ainsi participé à l'invention de la psychanalyse.
Dans ce livre, traduction de sa thèse demeurée à ce jour inédite, on trouvera ce qui a mené Herbert Graf, le si jeune collaborateur de Freud, futur directeur de la scène du Metropolitan Opera de New York et du Grand Théâtre de Genève, inventeur du broadcast lyrique, à questionner dans son œuvre la vie des fantasmes. Et quelle place, invisible du public, il assigne au metteur en scène d'opéras. Saisi sous cet angle, Richard Wagner perd beaucoup des séductions qui en firent le musicien du troisième Reich.
Car dans sa thèse, Herbert Graf rassemble une première fois les composantes de son expérience. « Que savais-je en ce temps-là de l'importance pour moi d'avoir grandi dans un entourage dans lequel Richard Strauss, Loos, Kokoschka et Sigmund Freud allaient et venaient ? » Enchanté par la magie de Max Reinhardt, entre lectures de Nietzsche et références à Freud, il explique comment il rendra vivantes – c'est pour lui l'essentiel – les mises en scène lyriques auxquelles, désormais, il va consacrer sa vie.
François Dachet, psychanalyste, a déjà traduit avec Marc Dorner, et présenté, plusieurs textes dont Mémoires d'un homme invisible de Herbert Graf, l'unebévue-éditeur, 1993, Le cas Nietzsche-Wagner de Max Graf, l'unebévue-éditeur, 1999, ainsi que L'atelier intérieur du musicien, de Max Graf, Buchet/Chastel & EPEL, 1999. Il dirige la revue Superflux, l'unebévue-éditeur, et a récemment publié L'innocence violée ? Herbert Graf/le petit Hans : devenir metteur en scène d'opéras, l'unebévue-éditeur, 2008.
Maître de Conférences habilité à l'Université de Paris-Est-Créteil, il participe aux travaux de l'équipe associée Lettres, idées, savoirs.
Stéphane Nadaud
L'unebévue 2010 / ISBN n°978-2-914596 / 336 pages p. / 20€.

Voyager au plus profond des processus de productions de subjectivités ressemble à une navigation à la surface des flots. Il faut, pour ce genre d’entreprise, le courage et l’insolence du marin – son inconscience aussi – mais également la persévérance et l’endurance de l’explorateur « à la Jules Verne », ou, mieux, celle du mineur de fond. L’explorateur qui entreprend un tel voyage se devra donc d’avoir les qualités du généalogiste et celles de l’archéologue. Sera-t-il pour autant un historien ? Pas sûr !
Que veut dire : « Processus de productions de subjectivités » ? C’est cette question que se sont coltinés nombre explorateurs, de Soares (Pessoa) à Kafka, de Deleuze à Guattari (et de Guattari à Deleuze), d’Eisenstein à Héraclite, de Chamfort à Joubert – sans parler de Nietzsche. Suivant leur exemple, et plutôt que de tenter de répondre directement, de front, c’est-à-dire théoriquement à cette question, le présent ouvrage se veut une expérimentation, une pratique de ce type de voyage au sein des processus de productions de subjectivités. L’affirmation de ce que sont (devraient être) les productions de subjectivités revient toujours à les rabattre sur le « Sujet » qui, nous a enseigné Artaud, empoisonne l’Occident chrétien depuis si longtemps. Alors s’explique que le pluriel soit de mise à processus, à productions et à subjectivités – quand bien même ceux-ci (celles-ci) semblent aboutir à un individu : un être humain, une fleur, un chat… un livre.
Stéphane Nadaud est pédopsychiatre à l’Hôpital de Ville-Évrard dans le 93, et philosophe. Il a notamment publié : Homoparentalité, une nouvelle chance pour la famille ?, Paris, Fayard, 2002, Manuel à l’usage de ceux qui veulent réussir leur [anti]œdipe, Paris, Fayard, 2006, Homoparentalité hors-la-loi, Paris, Lignes, 2006. Et - avec Félix Guattari : Écrits pour L’Anti-Œdipe, Paris, Léo Scheer, 2005. Il a également fait l’Édition et préfacé Soixante-cinq rêves de Kafka et autres textes, de Félix Guattari, Paris, Lignes, 2007.
l’unebévue éditeur
José ATTAL
L'unebévue 2010 / ISBN n° 978-2-91459 / 224 p. / 20 €.

Freud est resté discret sur l’importance qu’avait pour lui Spinoza, son «frère d’incroyance », tout en déclarant : «J’admets tout à fait ma dépendance à l’égard de la doctrine de Spinoza ». En revanche, on connaît le goût de Jacques Lacan pour le philosophe marrane. Sa chambre d’étudiant était tapissée du plan de l’Éthique, et dans sa thèse de psychiatrie, la doctrine de Spinoza est présentée comme « la seule conception » pouvant rendre compte de la psychose paranoïaque.
En 1964, Lacan est exclu de l’Association Internationale de psychanalyse. Dans le vide qui se présente alors, propice à une nouvelle fondation, Althusser prend en charge Lacan qui traverse une crise grave, et en fait, à la manière de Machiavel, un Prince dont il sera le conseiller. Ainsi, c’est un Lacan sous influence qui trouve refuge à l’École Normale Supérieure pour y tenir séminaire, et qui déclare, dans la première séance, qu’il vient de subir une excommunication, celle même du marrane Spinoza, un herem, dans son degré maximal, chamata.
Sa « cogitation spinozienne » prendra fin en récusant la position de Spinoza à l’endroit du sacrifice et de l’Amor intellectualis dei comme n’étant pas tenable pour le psychanalyste. Le psychanalyste ne peut pas être excommunié.
Avec le plus grand respect, Lacan a congédié Spinoza qui avait tant compté pour lui. Ce geste est loin d’être reconnu par nombre de psychanalystes aujourd’hui, – de fait, « althussero-lacaniens » –, dont l’affiliation à leur groupe repose souvent sur une identification à un Lacan excommunié, propre à unifier ce qu’ils appellent « le peuple psychanalytique ».
François Dachet
L'unebévue 2008 / ISBN n°2-914596-21- / 10 €.
L’INNOCENCE VIOLÉE ?
LE PETIT HANS HERBERT GRAF
DEVENIR METTEUR EN SCÈNE D’OPÉRA
FRANÇOIS DACHET
Il y a précisément cent ans, Freud rédigea le texte du Cas de phobie d’un petit garçon de cinq ans, connu comme Cas du petit Hans. Sous ce pseudonyme prêté au jeune Herbert Graf, Freud fit savoir une conception de la sexualité infantile élaborée essentiellement avec ses analysants adultes. La psychanalyse garda ensuite jalousement séparés le symptôme phobique de Hans confit dans le texte freudien et l’œuvre artistique de renommée internationale qu’Herbert Graf poursuivit jusqu’à sa mort en 1973. « La publication de cette première analyse d’un enfant avait causé un grand émoi et encore plus d’indignation ; on avait prédit tous les malheurs au pauvre petit garçon, violé dans son innocence en un âge si tendre et victime d’une psychanalyse », écrit Freud en 1922.
La relance signifiante et littérale produite à partir du séminaire de Lacan n’est pas parvenue à arracher complètement ces questions aux jugements pédagogiques, normalisateurs, voire psychopathologiques. Ceux-ci convergent aujourd’hui avec les actes et règlements juridico-politiques qui mènent à une éradication subjective des enfants au motif de protéger leur innocence supposée. Restituer l’œuvre de Herbert Graf à la psychanalyse permet de réfléchir à ces questions sans heurter de front l’émoi que leur évocation suscite dans les institutions comme dans la cité. Et de se demander quel rapport la psychanalyse entretient actuellement avec ses « cas ».
Jeremy Bentham
L'unebévue 2008 / ISBN n°ISBN : 2-914 / 28 €.

Isabelle Mangou
L'unebévue 2008 / ISBN n°1284-8166 / 166 p. / 20,00 €.

Colette Piquet
L'unebévue 2008

Elisabeth Kargl
L'unebévue 2008 / ISBN n°2-914596-19- / 96 p. / 10 euros.
Catherine Lord
L'unebévue 2007 / ISBN n°2-914596-18 / 56 p. / 10 €.
David Halperin
L'unebévue 2006

Catherine Lord
L'unebévue 2006 / ISBN n°ISBN 2-9145 / 25 euros.


Jeremy Bentham
L'unebévue 2005





L'unebévue 2004 / ISBN n°2914596103 / 126 p. / 22 euros.
La loi, la norme, le néologisme. Anne F. Garréta
«Je sais bien qu'on doit à Jacques Lacan lui-même ce verdict sans appel selon quoi il n'y a pas de métalangage. Je sais bien (et vous ne vous attendez pas, je l'espère, à m'entendre dire après ce que j'ai avancé déjà, “mais quand même…”), et c'est pourquoi il me paraît qu'il ne métalangageait ou métalanguait pas au fil de ses 350 locutions, mais que peut-être il méta-glosait, en décalant la langue, de la parole à sa trace dans l'écriture».
Qui math aime mathème. Jacques Roubaud
En gris pâle, quasi effacé Jacques Roubaud termine ainsi son article : de la chute résulte la haine de la poésie
un manque.
pour le rémunérer : l'oulipo
l'oulipo se tourne vers la mathématique : Bourbaki
le docteur L. ressent confusément le manque, se tourne vers Mallarmé ; because le diagnostic; mais on ne comprend pas Mallarmé sans examiner, théoriquement, simultanément la démarche de la prose et celle de la forme (sonnet puis coup de dés)
le docteur L. ne l'a pas fait, parce que la forme poétique est pour lui, pour presque tous, point aveugle.
Double aspect : comme chez les fondateurs de l'oulipo il y a fascination pour le modèle Bourbaki comme exercice d'écriture sous contraintes et comme groupe; on pourrait dire que le retrour à Freud plagie le retour à Hilbert des bourbakistes; avec cette différence que le docteur L veut être Hilbert, prendre, comme Hilbert triomphant de Brouwer, prendre le pouvoir (question de l'école)
la mathématique; la mathématique est son amour de loin. Cet amour a un nom : mathème
alors comment? Il faut marquer de façon qu'on ne puisse pas confondre, son monde possible de langue
et voilà
La galère Ou Pourquoi j’ai participé à la confection du volume intitulé 789 néologismes de Jacques Lacan. Marcel Bénabou Secrétaire définitivement provisoire de l’Oulipo
De ce bref survol des pratiques langagières de Lacan et des Oulipiens , on pourrait retenir qu’il y a incontestablement une parenté, au moins partielle, mais qu’il y a peut-être un moment où les chemins divergent.
Il s’agit en effet, dans un premier temps, d’un effort commun pour explorer la langue, pour exploiter au maximum les possibilités qu’elle peut receler dans ses profondeurs oubliées ou ignorées.
Dans un deuxième temps, la démarche se complique : il s’agit de multiplier encore ces possibilités, cette fois par un coup de force sur l’orthographe, sur la morphologie, voire sur la syntaxe. Coup de force dicté, chez l’oulipien, par la nécessité d’obéir à la contrainte qu’il s’est imposée. On songe à Perec, rusant sans cesse avec la langue pour parvenir à écrire La Disparition, et n’hésitant pas carrément à la malmener pour écrire Les Revenentes.
Mézalor, mézalor, à quelle secrète contrainte obéit donc Lacan quand il se lance dans le tourbillon de ses créations verbales ?
Sept fois sur le bout de lalangue. Jean Louis Sous
A-t-on vraiment digéré et comment a-t-on digéré le fait que Lacan ait pu faire passer le concept de langage à lalangue et que par là-même (double mouvement), dans l’appensée de lalangue, avec l’instrument de ce nouvel appui physique, il ait opéré également le passage du dit concept à cette lalangue ? Dans ce geste néologisant, on ne peut pas ne pas sentir, dans le sujet supposé savoir, par exemple, l’ironie allitérative à l’endroit de toute posture métaphysique ainsi que les glissements progressifs de la supposition. On peut entendre dans lalangue, le babillage qui l’habille et l’anime, et saisir comment l’unebévue désaissit toute prise de conscience dans l’éclair de la méprise.
Le mot juste. Jacques-Alain Miller
Le mot juste, je dis ce qu'il est pour moi. C'est celui qui fait que l'on s'écrie : «C'est tout à fait ça !» Le mot juste touche au bon endroit.
Qui songe à dire d’un mot : «C'est un néologisme» ? Un faiseur de dictionnaire, un puriste, un oulipien,… en tous les cas, le contraire d'une âme sensible. Le mot juste n'est jamais néologique. C'est pourquoi je ne vois point de néologisme chez Lacan. Ni un, ni deux, ni sept cent quatre vingt neuf, ni même sept cent quatre vingt treize. Ce sera ma thèse.
La première, non pas la seule.
Deuxièmement, je dis que, chaque fois que Lacan introduit un néologisme, il le fait précautionneusement, avec la plus grande délicatesse. Il met le plus grand soin à vous signaler l'infraction et à solliciter votre indulgence.
En troisième lieu, innombrables sont les néologismes de Lacan. C'est une multitude, une foultitude, un fourmillement, un tourbillon. Que dis-je ? — c'est une nuée. Elle défie tout dénombrement. Rangez vos cahiers.
Cela ne tient pas ensemble, cela est inconsistant ? Ah ! ce n'est pas pour me faire peur. Comme Hugo coiffait d’un bonnet rouge le vieux dictionnaire, nous pouvons bien le coiffer d'un chaudron.
Lacan, Boltanski, Roubaud. Dominique de Liège
Lorsque toute une équipe de balayeurs a eu ramassé dans les séminaires et textes tout un paquet de mots inventés par Lacan, la question s’est posée de savoir qu’en faire.
On pouvait tout imaginer… Gloser à l’infini sur l’intérêt de telle ou telle création était à éviter…
L’idée est venue de traiter ces néologismes comme Roubaud a traité les ensembles de Boltanski.
Et donc, après une partie pseudo-dictionnaire formellement classique mais qui ne donne pas de définitions, le livre propose une trentaine de listes dont une, la liste «familles» qui en comporte elle-même 32. Nos listes donnent toujours leur raison, parfois savante (comme la liste Gaffiot-Bailly qui recense les néologismes construits d’après le latin ou le grec), parfois ludique (comme la liste 13*13 qui propose 13 néologismes de 13 lettres parce que Lacan est né un 13 et parce qu’il a écrit un article sur le chiffre 13). Elles ne sont en rien exhaustives : chacun de nous peut en fabriquer d’autres, à sa façon…
Le Transfini, Les Structures & La Logique. La Philosophie Mathématique de Russell revisitée. Jean-Claude Dumoncel
Jusqu’à l’Introduction à la Philosophie Mathématique le structuralisme de Russell reste subordonné à son Logicisme. En effet l’identité de structure se définit par la similarité des relations et par conséquence le concept russellien de structure est analysé sans reste par la Logique des Relations. Mais en 1948, dans le chapitre «Structure» de La Connaissance humaine, son Champ et ses Limites, le rapport est inversé. Pour illustrer ce qu’il entend par « structure », en effet, le premier exemple que donne Russell n’est autre que la forme logique, cela signifie que la Logique se trouve subsumée sous le concept de structure et que le Logicisme est devenu un Structuralisme.
User de thématique maladive. Éric Legroux
Ruse avide, rude usage, maladive thématique, lettre volage, qu’est-ce qui amuse le Dr L. lorsqu’il use de la dive mathématique
John Rajchman
L'unebévue 2002 / ISBN n°2914596-02-2 / 160 p. / 22 euros.
Préface de Paul Virilio
Traduit de l'anglais (américain) par Guy Le Gaufey

John Rajchman explore comment le pli, l’abstraction, la légèreté, la lumière, les autres géométries, permettent de nous infiltrer dans les intervalles et les trous imperceptibles par lesquels la ville est toujours virtuellement radieuse. De la bonne ville et du meilleur des mondes, nous sommes passés, nous dit-il, à un espace/ville intensif, où nous sommes libres d’envisager le “devenir ville” de nos corps, le “devenir corps” de nos villes.
John Rajchman, professeur à l'Université Columbia de New York, est un des rédacteurs et des animateurs de ANY (Architecture New York) de même qu'il participe à la rédaction de ARTFORUM (New York) et Critical Space (Japon).
Auteur de nombreux livres. Sont actuellement traduits en français aux PUF, en 1987, Michel Foucault, la liberté de savoir, en 1991 en collaboration avec Cornel West, une anthologie de La pensée américaine contemporaine, et en 1994, Erotique de la vérité. Foucault, Lacan et la question de l'éthique.
Jean-Claude Dumoncel
L'unebévue 2002 / ISBN n°2-914596-08- / 208 p. / 20 euros.
Supplément au n°20 de L'Unebévue
Traversant toute l’histoire de la philosophie, sous la succession apparemment chaotique des systèmes, il existe un lignage tenace qui s’est maintenu jusqu'à nous en se jouant de tous les obstacles : c’est la tradition de la Mathesis Universalis . Elle est ponctuée par trois principaux noms : Platon, Leibniz et Russell. Chacun de ces auteurs offre des problèmes de lecture inattendus mais qui s’enchaînent en un seul récit.
Chez Platon, l’opposition notoire entre Mythos et Logos nous cache encore, jusque dans la systématicité de l’allégorie où s’affrontent Participation et Simulations, la fonction symbolique d’un Machinisme en mouvement. Il se retrouve dans ce que Leibniz appelle “mécanisme métaphysique”, identifié à la Jurisprudence Universelle, le rôle du moyen terme étant tenu par le calcul variationnel à l'état naissant, qui remplit l’office de “mathématique divine”. Et le problème est alors de voir comment l’Optimisme (en tant que théorie de tous les mondes possibles) se subordonne la Monadologie (en tant que théorie du monde réel). Chez Russell, qui reprend le projet logiciste de Leibniz dans la nouvelle donne définie par Cantor, il s’agit de saisir en quoi l’un des fondateurs de la Philosophie Analytique peut être aussi l’auteur d’un système. Qu’y a-t-il dans les Principia Mathematica écrits à quatre mains avec A.N. Whitehead ? Et en quoi la logique des relations qu’ils contiennent peut-elle renouveler la Métaphysique ?
L’ouvrage, qui commence par une méthodologie de l’exégèse philosophique, se termine en indiquant trois contresens capitaux qui, sur la longue durée, tracent comme l’ombre du lignage principal.
Jean-Claude Dumoncel a enseigné la Logique et l'histoire des Mathématiques à l'Université de Caen. Il a publié : Le Jeu de Wittgenstein (PUF, 1991), Le Symbole d'Hécate (HYX, 1996), Les Sept Mots de Whitehead (EPEL, 1998), Le Pendule du Dr Deleuze (EPEL, 1999). Sous presse : Philosophie des Mathématiques.
Jean Allouch
L'unebévue 2001 / ISBN n°2914596-057 / 208 p. / 120F - 18,29 euros.

Il faudra bien que le psychanalyste paye le prix de sa tentative inouïe d’établir son camp ailleurs que chez Sade. Ce prix a un nom : le fantasme. L’événement Sade exigeait qu’il perde sa prétendue suprématie, pas seulement en psychanalyse. Lacan s’y employait. Mais plutôt discrètement, au point d’en venir à titrer son étude quasi à rebours de ce qu’elle indiquait.
De là les malentendus dont «Kant avec Sade» n’a cessé d’être l’objet. Il est vrai que, jamais publiée en son lieu, la lettre elle-même de cet écrit était devenue pratiquement inaccessible, tant devaient varier ses versions successives (1963, 1966, et encore après).
Kant n’est avec Sade que le temps de s’apercevoir que, «plus honnête», la maxime sadienne (elle est de la plume de Lacan) écarte la réciprocité. Avec l’instrument Sade, pèse plus qu’un soupçon sur Kant.
Qu’advient-il, ensuite, à ce Sade sans Kant ? En remarquant que la production de l’œuvre sadienne fut rendue possible par le fait que, dans sa vie, Sade était passé au-delà des limites constitutives de son fantasme, Lacan entend souligner que cette vie était réglée par la rigueur de sa pensée. Ici, silencieusement, Lacan flirte avec la lecture souverainiste de Sade proposée par Bataille, puis Blanchot – mais pour bientôt s’en écarter.
Assimiler vie et œuvre de Sade, telle fut l’opération constitutive du sadisme. Il n’est remarquablement pas question du sadisme dans «Kant avec Sade». Ni de perversion.
Lue par Lacan, l’œuvre de Sade se laisse situer dans «les portants de l’éthique chrétienne». Cependant, pour être passée au-delà, sa vie n’en rencontre pas moins une autre limite. Pas «assez voisin de sa propre méchanceté pour y rencontrer son prochain», Sade rejette sur l’Autre la douleur d’exister. Ce qui implique un Autre existant, non barré. Sade a affaire à une loi («pathologique» au sens de Kant), dans la volonté de jouissance de la Présidente de Montreuil, et non pas au désir. À la mode sadienne, Lacan écrit : «Vºée [lire : violée] et cousue, la mère reste interdite ». C’est : «Sade, encore un effort si vous voulez être sadien.»
Il n’est guère question, en tout cela, d’un «traité vraiment du désir» ni donc «de ce qui manque à Sade». Le dit chantre du manque, préfacier écarté de La philosophie dans le boudoir, s’interdisait, en 1963, d’écrire ce qui aurait été un traité du désir sadien. Pas absolument toutefois.
Isabelle Mangou
L'unebévue 2001 / 128 p. / 45 ill., 120 FF.

Trois écoles sont ici convoquées : l’école des saturae, telle que Pascal Quignard peut la pratiquer, celle des nymphes, des Vénus et des amazones, telle qu’Aby Warburg l’a mise en jeu dans son immense bibliothèque, et celle de la Brahd Aranyaka Upanisad telle que Lacan l’indique à ses élèves-psychanalystes, trois écoles du balbutiement, où Renart, Wanda, Gradiva, nous enseignent que l’étreinte n’a qu’une lettre, une littera où s’accrocher. Le balbutiement, en ne prenant pas la parole, en composant le silence, permet un point d’expulsion de la parole. La parole se prend, de se perdre.
Comme Renart fuyant à travers les broussailles, le balbutiement met en mouvement quelques notions canoniques de la psychanalyse, la répétition, la lettre, le masochisme.
Tout savoir est une déclinaison de ob, oublier, obscurcir, blâmer, se taire. C’est une passe, une passio, une pessa’h — qui ne dépassionnera jamais, mais qui dépassive. Cette passe, faille, défilé, ruelle, douve, ne tient que de trois :
- Le sacrifice du langage, organisant le rituel de l’érotique humaine ; bouche close, absence d’aveu, secret. Ce passage exige la destruction de l’expression linguistique.
- La suppression de la vision, ce sont les clignements de paupières pour une nuit qui édicte le tabou du visible. Coupillage, battement, c’est l’image absente, immontrable et productive d’apparitions-hantises.
- Le geste cruel qui troue les oreilles, rend sourd et déshumanisé, c’est-à-dire entendant et petit animal qui jappe.
Les sordidissima, injures, mouches, paroles irruptives, ne sont pas des anomalies gênantes, elles participent à ces points-moments de combustion et de production.
Jean-Louis Sous
L'unebévue 2000 / ISBN n°2908855550 / 150 p. / 120 FF.

Certaines «écritures» lacaniennes ont-elles vieilli, ou pour dire les choses plus directement, ne sont-elles plus à la mode, comme si elles étaient datées, très liées à l'époque où elles ont été produites ? Est-ce que ces formalisations n'apparaissent pas précaires ?
Les dessins, les formules, les graphes, les nœuds borroméens, qui émaillent toute l'œuvre de Lacan, quel statut leur donner ? Avant de filer vers l'universel, avant de crier à l'hérésie au regard du dogme conceptuel, il faut pouvoir dire ce qu'elles sont, ces écritures «à la gomme». Plutôt que de les ériger tout de suite en instance conceptuelle, il s'agit de comencer par une étude localisée des occurrences et des circonstances où elles apparaissent, et établir à quel registre de problématisation elles répondent, selon les époques, suivant les périodes de formalisation de Lacan. Ensuite, on pourra dire si ça tient le coup !
L'auteur nous propose donc, à titre… comme on dit, de réquisit épistémologique, de l'accompagner tout au long de ce parcours de lecture, de convoquer souvenir et mémoires de textes, de devenir les «biographes» de ces «écritures».
Faire cas de ces formalismes suppose alors une méthode casuelle qui décline les variantes de telles écritures, les versions de leur composition et de leur décomposition, les limites de leur usage, les bornes de leur emploi. Selon le glissement auquel nous invite Lacan, c'est une méthode sérieuse dans le sens où elle touche au réel ; façon de faire entendre les variations autour de ces mathèmes, si tant est qu'on puisse leur donner ce titre…
David M. Halperin
L'unebévue 2000 / ISBN n°2-908855-53- / 60.00 FF.
Traduit de l’américain par Guy Le Gaufey et George-Henri Melenotte
David M. Halperin a publié en français Cent ans d’homosexualité, Paris, EPEL, 2000, et Saint Foucault, Paris, EPEL, 2000.

Les Grecs tenaient pour acquis que pratiquement aucun homme ne pénètre et ne se soumet à la fois à la pénétration d’autres hommes, durant la même période de sa vie, et pour cette raison, le désir réciproque de partenaires appartenant à la même catégorie d’âge est à peu près inconnu dans l’homosexualité grecque.
L’abandon par Platon des formes conventionnelles de pensée et de discours est frappant. Socrate déclare que le jeune aimé en vient à participer au désir passionné qu’a de lui son amant. L’approche platonicienne efface presque la distinction entre l’amant et l’aimé, entre le partenaire actif et le partenaire passif. Il n’y a en effet aucune place pour la passivité dans la poursuite de la vérité. Le langage de Platon a pour dessein de souligner le caractère actif et agité du désir qui est commun au pédéraste passionné et à l’aspirant philosophe. La réciprocité érotique résout par là un problème important et pressant dans l’éthique grecque. Elle établit des contacts entre les individus, en harmonisant les revendications de soi et de l’autre et en intégrant les vertus traditionnelles “compétitives” de l’héroïque autonomie aux vertus “co-opératives” de l’obligation civique ; elle réconcilie, même si cela reste dans les limites étroites de l’union érotique, ces deux modèles de valeur morale concurrentiels, destinés typiquement à se heurter dans les sociétés de pénurie, qu’elles soient antiques ou modernes.
Platon refuse de séparer l’érotique de la sexualité, l’érotique de la conversation, et l’érotique de l’investigation philosophique. La réciprocité fournit un lien crucial entre ces espèces de désir, différentes, tout en restant authentiques : elle garantit leur unité essentielle et fournit une indication infaillible à leur nature commune.
Janine Germond
L'unebévue 2000 / ISBN n°2908855585 / 60 FF.

On sait plus ou moins clairement que tout un pan de la vie de Raymond Roussel est resté caché. Pierre Janet ne fera jamais allusion à l’homosexualité de son patient, Michel Leiris l’évoque brièvement. On sait néanmoins que Roussel a dû parfois partir en voyage pour éviter des scandales.
Mais dès 1904, Roussel va affronter un article remplissant les deux premières pages de La Cocarde, journal financier antisémite et dans lequel il est accusé de “ délits ou crimes ”. Cette publication dévoile, à la Une, l’homosexualité de Roussel, qu’il gardait secrète, ses rencontres avec “ de nombreux mineurs de sexe masculin ” et même, des poursuites et chantages de la part de pères de jeunes gens qu’il aurait séduits. Cela se passe quelques mois à peine après la parution de La Doublure, en juillet 1897, alors que le peu d’écho fait à cet ouvrage le laissait bouleversé. Cette affaire durera de 1898 à 1905. Peut-on imaginer les répercussions sur un très jeune homme et ce qui a pu en résulter ?
Roussel et sa mère vont l’un et l’autre tenter de cacher cet aspect de sa vie et ils y arriveront. Raymond Roussel ne parlera jamais d’homosexualité dans son œuvre et cet article, après avoir eu sans doute à l’époque l’effet d’une bombe, est très vite retombé dans l’oubli, bouclé au placard.
On connaît Raymond Roussel vivant seul, très retiré, très isolé, dans le luxe de riches demeures, avec un train de vie somptueux. Sa vie, ses inventions, son écriture, ses voyages, sont-ils frappés du sceau de cette affaire ? Un besoin de camouflage vient-il s’inscrire en particulier dans son mode d’écriture par des procédés de plus en plus hermétiques, et leur dévoilement posthume ?
George H. Bauer
L'unebévue 1999 / ISBN n°2-908855-44- / 65,00 FF.
Traglais de l'anduit par Guy Le Gaufey

Dans ce petit ouvrage à la fois sérieux et hilarant, G. H. Bauer, spécialiste américain de Marcel Duchamp, montre avec un brio digne de Duchamp lui-même, que chaque production de Marcel était un pun, un mot faisant jouer l'équivoque tous azimuts, entre deux langues, l'anglais et le français, mais également entre une série de tableaux et d'événements.
Œdipe ne questionne plus la Sphinge, il la pelote.
George H. Bauer enseigne la littérature française et comparée à l'Université de la Californie du Sud. Il est notamment l'auteur de Sartre and the Artist, 1969, Duchamp/La mise en plis des lettres / Vois Elle Con Sonne, et Duras and the Artist.
François Dachet
L'unebévue 1999 / ISBN n°2908855461 / 60.00 FF.
Traduit par François Dachet et Marc Dorner. Postface de F. Dachet.
Dédiée à Gustav Mahler, cette étude sur le tournant des relations entre Nietzsche et Wagner a été écrite à l’orée du XX° siècle par Max Graf, musicologue et critique musical viennois, collaborateur de Freud, connu en psychanalyse comme père du petit Hans. L’analyse psychologique montre les personnages wagnériens marqués par le nihilisme de Schopenhauer, dont Nietzsche refuse, après Bayreuth, les conséquences artistiques et politiques. Mais cela ne justifie pas le rejet de la musique wagnérienne. Trente ans avant le nazisme, Max Graf délimite les enjeux de ce débat essentiel.
La postface de François Dachet vient éclairer comment certains textes de Freud et de Max Graf s’entrecroisent, se confondent ou se répondent, en une interrogation commune sur la création artistique dans ses rapports avec l’inconscient.
Jean-Claude Dumoncel
L'unebévue 1999 / ISBN n°2908855410 / 110 p. / 120,00 FF.
Jean-Claude Dumoncel a enseigné l'Esthétique et la Logique à l'Université de Caen. Il a publié : Le Jeu de Wittgenstein, Puf, 1991, Le symbole d'Hécate : philosophie deleuzienne & roman proustien, HYX, 1996 et Les sept mots de Whitehead.
Une explication de L'Anti-Œdipe et de Mille Plateaux, de Deleuze et Guattari.
En enchaînant trois mythes modernes,
- le mythe des machines célibataires comme vision de la schizophrénie,
- le mythe tragique de l'Angélus de Millet comme paradigme de la méthode paranoïa-critique,
- et le mythe individuel du névrosé selon Lacan comme mode d'individuation,
représentés respectivement par les trois objets qui les donnent à voir,
- le Grand Verre de Marcel Duchamp,
- l'œuf de Salvador Dali,
- et le Cube de Francis Bacon,
Jean-Claude Dumoncel expose la thèse deleuzienne du désir producteur. Elle se comprend dans une théorie générale du devenir-x, engendrant les harmoniques du devenir-enfant, du devenir-animal (etc.) autour d'un «Devenir-partir» encore plus simple et plus secret.
Jean Allouch
L'unebévue 1998 / ISBN n°2-908855-35- / 120.00 FF.
Après L’éthification de la psychanalyse, Calamité, voici un deuxième volet : la psychanalyse n’est pas une éthique mais une érotologie.
Pourquoi donc tant de difficultés à s’admettre pour telle ? A rendre compte du fait que c’est par une opération elle-même érotique (on appelle cette opération “analyse”) qu’un sujet s’assujettit à Éros (on dit qu’il trouve son identité comme sexué) ?
Il n’y a pas loin entre la pratique analytique de Lacan et celle, philosophique, de Foucault puisque, pour l’un et l’autre, il ne s’agit pas tant de comment parler vrai de sa vie érotique que de l’érotique du dire vrai.
Dany-Robert Dufour
L'unebévue 1998 / ISBN n°2-908855-31- / 120.00 FF.
Dany-Robert Dufour, philosophe, enseigne à l’Université de Paris 8. Il travaille sur différentes formes de rationalité qu’il nomme unaire, binaire et trinitaire. Il est l’auteur notamment de Les Mystères de la trinité, et Folie et démocratie
Il faut prendre en compte ce que le miroir lacanien doit au miroir sophianique de Jacob Boehme. Je gage que si le miroir lacanien fut si neuf et s’il continue de l’être, c’est parce qu’il a réintroduit en plein vingtième siècle un schème de pensée “irrationnel”, “magique”, baroque, un “hiatus irrationalis” issu du mysticisme spéculatif et théosophique. Ce schème fut transporté à grands frais dans un nouvel environnement de pensée (par Koyré) et déplacé (par Lacan) de la déité au sujet lui-même.
C’est cela la vraie audace du miroir : avoir pris une forme ancienne (et “unaire”, au sens non-binaire) comme étant plus moderne que les formes modernes de la rationalité.
Leo Bersani
L'unebévue 1998 / ISBN n°2-908855-36- / 65.00 FF.
Traduit de l’anglais par Guy Le Gaufey.

Cet essai au titre provoquant se tient à la croisée de multiples chemins : d’abord l’horrible tranchée taillée par le sida dans les milieux homosexuels, et les réactions de rejet social qui s’ensuivirent. Puis le questionnement aigu sur la nature de l’identité sexuelle – bastion imprenable de la “normalité” – que toutes les nouvelles revendications des groupes gay et lesbien portait alors en pleine lumière. Enfin, dans ce même début des années quatre-vingt, lors de ses nombreux séjours dans les Universités américaines, Michel Foucault avançait son Histoire de la sexualité (sans trop faire de mystère de la sienne), offrant ainsi à cette agitation sociale et sexuelle complexe quelques-unes de ses coordonnées historiques et philosophiques.
En faisant se heurter toutes ces dimensions hétérogènes dans un style vif, à l’occasion percutant, Leo Bersani – professeur de littérature française à Berkeley, lié aux mouvements activistes gays américains – a publié dès 1987, dans la revue October, cet essai d’emblée retentissant, aujourd’hui un classique dans les Gay and Lesbian Studies. Tout en critiquant de près les outrances verbales et idéologiques de certains militants gays et lesbiens, il en vient – via Freud et Bataille, entre autres – à interroger la jouissance supposée dans l’acte sodomique : le rectum serait-il la tombe de ce phallus priapique que vénère le style macho ?
Leo Bersani a déjà publié en français Baudelaire et Freud, en 1981, Théorie et Violence, Freud et l’art, en 1984 et en 1998, Homos, repenser l’identité.
Jean Allouch
L'unebévue 1998 / ISBN n°2-908855-37- / 120.00 FF.
Rien ne semble entamer l’inimaginable faveur dont ne cesse de bénéficier la vérité. Ses antonymes, le mensonge, la tromperie, l’erreur, l’illusion, ne s’opposent à elle qu’en y faisant appel. L’amour même la convoque : on le veut vrai. Science, religion, magie, vie quotidienne l’invoquent comme une référence sans laquelle aucun de ces discours et pratiques ne tiendrait. On porte, à juste titre, des millions de morts à son compte, un tant soit peu soutenue, elle cautionne les persécutions les plus résolues, et cependant les quelques procès qui lui sont intentés – philosophiques – n’entament guère son prestige.
C’est que seul l’oubli la met en cause ; la vérité est en permanence menacée de sombrer dans l’oubli, plus radicalement encore, dans l’oubli de l’oubli. De là son nom grec d’a-létheia qui dit qu’elle est ce qui prive d’oubli ( de léthé). Mais quelle est son arme contre l’oubli ? Le phallus. Chaque culture de la vérité est un culte phallique, ce que déjà disait la racine indo-iranienne du mot rta (Detienne).
“C’est de réminiscences surtout que souffre hystérique”. Avec cette phrase, Freud donnait le véritable coup d’envoi de la psychanalyse. Elle revenait à dire que le symptôme prive d’oubli, qu’il est une vérité. Or, un gigantesque malentendu s’est très tôt greffé là-dessus. Partant de ce non-oubli, paradoxalement, on a orienté la psychanalyse vers la recherche de l’oublié – c’est l’anamnèse – alors qu’il s’agissait d’oublier ce qui n’avait pas pu l’être.
Il revint à Lacan de lever ce malentendu. On entreprend ici la lecture des voies qu’il a ouvertes de sa subversion de la vérité. Elles convergent avec la critique de la psychanalyse formulée par Foucault sur la base d’un constat que pour le moderne sujet de la jouissance, la question n’est pas celle de la vérité de son érotique (c’est la psychanalyse faite pastorale) que l’érotique de sa vérité (la psychanalyse en tant qu’érotologie de passage).
Jean-Claude Dumoncel
L'unebévue 1998 / ISBN n°2-90-8855-34 / 195.00 FF.
Jean-Claude Dumoncel a enseigné l’Esthétique et la Logique à L’Université de Caen. Il a publié : Le Jeu de Wittgenstein, Puf, 1991, Le symbole d’Hécate : philosophie deleuzienne & roman proustien et HYX, 1996.
A.N Whitehead (1861-1947) a d’abord enseigné les mathématiques à Cambridge. C’est en collaboration avec B. Russell qu’il a publié les Principia Mathematica dont les trois volumes (1910-1913) constituent la bible de la Logique symbolique. En 1924, alors qu’il vient d’atteindre l’âge de la retraite, l’Université Harvard lui propose une chaire de philosophie. C’est ainsi qu’il commence à soixante trois ans une seconde carrière. Elle fera de lui l’auteur d’un nouveau système de métaphysique parmi les plus audacieux et les plus déroutants, dont l’exposé se trouve dans Processus & Réalité (1929).
Selon Whitehead, le “Tout s’écoule” des Anciens s’est transformé en un “Tout est vecteur” des Modernes. La totalité du Cosmos est celle d’une “Créativité” avec ses “accidents” et leurs “préhensions”. En fonction de cette Créativité, c’est l’ “ingression” d’ “objets éternels” dans les “entités actuelles” qui détermine dans l’espace-temps la répartition du Topoïde et du Chronoïde. Chaque “occasion actuelle” est alors un “sujet-superject” réalisant sa propre “concrescence” doublée d’une “cogrédience”. Ainsi s’édifie une Métaphysique de l’Événement comme Enjoyment qui est à l’origine de tout le courant de pensée appelé Process Philosophy. Le présent ouvrage en est une explication depuis les Éléments.
Pièce de Alain Neddam, d'après Louis Wolfson
L'unebévue 1997 / ISBN n°2-908855-26- / 120.00 FF.
Louis Wolfson nous fait traverser une réalité qui pourrait être douloureuse ou accablante si elle n’était pas vue à travers l’extraordinaire lucidité et insolence des raisonnements absurdes, des paradoxes et des révoltes qu’autorise l’ironie. Ainsi dégagée de tout pathos, la pièce fait valoir que nul ne parle plus justement de l’agonie et de la mort d’un être cher que Louis Wolfson, écrit Alain Neddam.
Louis Wolfson, celui qui se nomme lui-même étudiant en langues schizophrénique, raconte la mort de Rose, sa mère, morte en réussissant une allitération française inouïe Ma mère Musicienne est Morte d’un Mésothéliome Métastasiant (et Mettons de Manques Médicaux) au Milieu de Mai, à Minuit, Mardi à Mercredi au Mouroir Memorial à Manhattan Mille 977.
Jean Allouch
L'unebévue 1997 / ISBN n°2908855275 / 120.00 FF.
Comme l'informatisation actuellement, l'électrification il y a quelques décennies, plus loin encore l'industrialisation, autant de vagues auxquelles nul n'échappe pour peu que l'on se trouve sur leur parcours, de même, toutes tendances confondues, la psychanalyse subit-elle aujourd'hui de plein fouet une déferlante : l'éthification.
On fera valoir qu'ainsi éthifiée la psychanalyse n'a tout simplement plus lieu.
Qu'elle est donc en train de… mourir d'éthique.
Sans le savoir.
Calamité. Plus question du surmoi, voici venue l’éthique ; plus question du cas, voici venue une clinique du fait social ; plus question de méthode, voici venu l’analyste sachant ; plus question de rendre raison de l’expérience, voici venue la psychanalyse comme idéologie.
Cette quadruple calamité, cependant, a son revers de révélation ou de confirmation (car déjà Freud le savait et y tenait) : il n’y a pas d’éthique psychanalytique.
Un cas nous l'enseigne aujourd'hui, sans doute plus exemplairement que tous ceux – nombreux – qui se trouvent semblablement (dés)orientés. On se propose de l'étudier, à partir du témoignage partiel et partial que nous offre l'ouvrage d'H. Besserman Vianna Politique de la psychanalyse face à la dictature et à la torture, N'en parlez à personne. Et de l'inénarrable happening auquel ce livre donna lieu, à Paris, hôpital Sainte-Anne, le dimanche 9 février 1997.
Il y va aussi de l’existence ou de la récusation de ce qui, depuis plus de vingt ans, tente de forcer sa voie sous le nom, encore maintenu presque absolument voilé, de psychanalyse derridienne.
L'unebévue 1994 / 176 p. / 11,43 euros.
Correspondance juin 1902 - décembre 1904 mars -juin 1912.
Texte bilingue. Traduction, notes et introduction de Catherine Webern
Quand Russell écrit pour la première fois à Frege en 1902, il lui annonce qu'à partir des travaux de Cantor, il vient de trouver ce qu'il appelle la Contradiction qu'on appellera ensuite «paradoxe de Russell». Frege venait de mettre dans ses Lois fondamentales de l'arithmétique l'ambition de pouvoir concevoir les objets logiques et justifier que les nombres sont des objets. Dès réception de la lettre, il reconnaît immédiatement que «le fondement sur lequel il pensait voir se construire l'arithmétique s'est mis à vaciller», plus, que «c'est le seul fondement possible de l'arithmétique qui semble s'enliser».
Cette correspondance, inédite à ce jour en français, est célèbre parce qu'elle porte en partie sur l'énoncé du paradoxe et ses conséquences, mais son intérêt est aussi ailleurs. Frege, soumis au questionnement et aux incompréhensions de Russell, est poussé à défendre ses conceptions et peu à peu, un enjeu se resserre entre les deux correspondants sur la distinction que Frege fait entre le Sinn et la Bedeutung d'une proposition, entre le sens et la signification. La correspondance se terminera sur l'impossibilité, pour Reussell, d'accepter le réel de l'objet : «Sur sens et signification, je vois sincèrement des difficultés que je ne peux pas surmonter. Sur les raisons qui m'empêchent d'adopter votre manière de voir : dans la proposition "Le Mont Blanc fait plus de 4000 mètres de haut", on affirme l'objet de la pensée et ceci est, à mon avis, un certain complexe, "une proposition objective pourrait-on dire", dans lequel le Mont Blanc lui-même est partie constituante. Si l'on n'admet pas ceci, on obtient à la fin que nous ne savons absolument rien sur le Mont Blanc lui-même».
L'intérêt suscité par l'œuvre de Frege fut très vif, en particulier chez Gödel, Wittgenstein, et Lacan. La référence de Lacan à Frege, des années soixante jusqu'à la fin de son séminaire en 1980, sera essentielle pour traiter du réel. En particulier, Lacan étaye la prééminence du semblant avec la théorie frégéenne, selon laquelle la conception du nom propre doit être liée à l'analyse de la proposition avec la fonction, ce qui entraîne une nouvelle approche de la signification du phallus et l'usage d'une topologie.
L'unebévue 1993 / 161 p. / 10,36 euros.
Dossier préparé par Béatrice Hérouard, Françoise Jandrot-Louka et Mayette Viltard.
Supplément au n°4 de la revue L’Unebévue
automne 1993
Les psychiatres n’ont pas attendu les psychanalystes pour constater cette chose tout de même étrange : on peut être malade du langage. Dès le milieu du XIX° siècle, en secrétaires consciencieux, ils ont noté jour après jour les dires apparemment les plus échevelés des aliénés, ils ont collationné les lettres, les poèmes, les dessins.
Désordres du langage, salades de mots, schizophasies, schizographies, glossolalies, cryptographies, incohérence, pseudo-incohérence, poésie, paroles inspirées, écrits inspirés, langue fondamentale, écriture automatique, stéréotypies, langages néologiques, etc. autant de tentatives , de 1850 aux années 30, de cerner ces troubles qui semblaient relever, dans leur majorité, des psychoses, mais qui n’en montraient pas moins quelque analogie, voire identité, avec le rêve d’une part, la création poétique de l’autre.
Anne-Marie Ringenbach - Éric Legroux - François Samson
L'unebévue 1993 / 50 FF.
La première série de dessins concerne l’article publié par Anne-Marie Ringenbach dans le n°3 de l’Unebévue : La bouteille de Klein, la passe, et les publics de la psychanalyse. Quelques dessins ayant été intervertis lors de l’impression de la revue, nous vous proposons dans ce cahier-ci les dessins remis dans le bon ordre, des dessins supplémentaires, et des instructions plus précises pour réaliser vous-même une bouteille de Klein et pour suivre, avec du papier calque, les enroulements de spires sur les quatre feuillets de la bouteille.
La deuxième série de dessins provient du séminaire tenu par Éric Legroux et Anne-Marie Ringenbach en 1992.
Herbert Graf
L'unebévue 1993 / 61 p. / 10,36 euros.
Traduction et présentation de François Dachet
Supplément au n° 3 de la revue L’Unebévue, été 1993.
En 1922, le jeune Herbert Graf rend visite à Freud et – nous dit celui-ci – se présente à lui comme étant “le petit Hans”.
En 1970, Herbert Graf se rend au Congrès de psychanalyse de l’enfant, qui se tient à Genève cette année-là, sous la présidence d’Anna Freud, et se serait présenté à elle comme étant “le petit Hans”.
En traduisant pour le public de langue française Memoirs of an Invisible Man, parus dans la revue Opera News au début de l’année 1972, transcription d’une interview accordée par Herbert Graf quelques mois plus tôt au journaliste Francis Rizzo, nous prolongeons ce mouvement.
