Poster un commentaire à la suite de l'article...


Document du lundi 21 septembre 2015

par  P. Valas

Jacques Lacan : La Troisième, en français, en espagnol, en allemand.

transcription par P. Valas et cie de l’intervention au congrès de l’EFP à Rome, 1er novembre 1974.
Audio mp3. Version numérique améliorée Ducan
Versions en français, en espagnol, en allemand.

En réponse à...

mercredi 21 mars 2012 à 20h26 - par  Henri Brevière

Aux transcripteurs de « La Troisième »
Bonjour,

Je vous remercie pour ce beau travail.
Après lecture je crois pouvoir vous proposer une légère amélioration, en fait une correction de ce que je pense être une erreur de transcription même si j’ai un doute, confronté au travail de pas moins d’une quarantaine de transcripteurs !! Cette erreur je la trouve dans le passage suivant : « Si j’injecte ainsi un bout de plus d’onomatopée dans la langue, ce n’est pas qu’elle ne soit en droit de me retoquer qu’il n’y a pas d’onomatopée qui déjà ne se spécifie de son système phonématique, à la langue. Vous savez que pour le français, Jakobson l’a calibré : c’est grand comme ça. Autrement dit, que c’est d’être du français que le discours de Rome peut s’entendre disqu’ourdrome . Je tempère ça à remarquer qu’ourdrome est un ronron qu’admettraient d’autres lalangues, si j’agrée bien de l’oreille à telle de nos voisines géographiques, et que ça nous sort naturellement du jeu de la matrice, celle de Jakobson, celle que j’en spécifiais à l’instant ».
Je dis une erreur de transcription parce qu’il suffit d’écouter l’enregistrement pour constater qu’on n’entend pas de « qu’ » après le verbe retoquer. Lacan sait bien que retoquer ne peut pas se construire avec une subordonnée conjonctive et il l’emploie bien comme un verbe transitif : « me retoquer ». Par contre le verbe rétorquer, lui, se construit avec la conjonction de subordination « que », mais il est absolument invraisemblable que Lacan ait pu faire un lapsus aussi énorme où sa langue aurait fourché de telle manière que voulant dire rétorquer il aurait dit retoquer ! Le verbe « retoquer » était d’un emploi assez rare à l’époque de La Troisième (1974) (aujourd’hui on l’entend constamment, ce qui demanderait d’ailleurs qu’on explique pourquoi). Verbe rare à tel point que Le premier transcripteur de La Troisième avait, sans état d’âme, entendu et transcrit à l’époque « me rétorquer ». Ce n’était pas la première fois que Lacan employait un mot un peu rare…
De toute façon la construction « me rétorquer qu’il n’y a pas etc. » serait de toute évidence un contresens (peut-être même un non-sens ?) par rapport à ce que Lacan veut dire.
Et la construction que vous avez choisie « me retoquer qu’il n’y a pas etc. », est, elle, de son côté, tout simplement agrammaticale, impossible.
Je propose donc la transcription suivante : « Si j’injecte ainsi un bout de plus d’onomatopée dans la langue, ce n’est pas qu’elle ne soit en droit de me retoquer, [virgule ou deux points, à voir] il n’y a pas d’onomatopée qui déjà ne se spécifie de son système phonématique, à la langue. Vous savez que pour le français, Jakobson l’a calibré : c’est grand comme ça. Autrement dit, que c’est d’être du français que le discours de Rome peut s’entendre disqu’ourdrome . Je tempère ça à remarquer qu’ourdrome est un ronron qu’admettraient d’autres lalangues, si j’agrée bien de l’oreille à telle de nos voisines géographiques, et que ça nous sort naturellement du jeu de la matrice, celle de Jakobson, celle que j’en spécifiais à l’instant ».

Pour faire apparaître plus clairement ce que Lacan dit on peut dans un premier temps expliciter son usage des négations, qui est à la fois très correct mais plein d’une préciosité (hypercorrection, comme on dit) qui peut embrouiller la compréhension. On obtient ceci : « Si j’injecte ainsi un bout de plus d’onomatopée dans la langue, ce n’est pas qu’elle soit en droit de me retoquer (le « NE » est explétif et on peut l’enlever, la phrase reste correct), [virgule ou deux points] il n’y a pas d’onomatopée qui déjà ne se spécifie PAS de son système phonématique, à la langue ( il faut ajouter PAS pour que le sens soit clarifié parce que le « ne » cette fois-ci n’est pas explétif mais vaut pour une négation dans cette proposition relative). Vous savez que pour le français, Jakobson l’a calibré : c’est grand comme ça. Autrement dit, que c’est d’être du français que le discours de Rome peut s’entendre disqu’ourdrome . Je tempère ça à remarquer qu’ourdrome est un ronron qu’admettraient d’autres lalangues, si j’agrée bien de l’oreille à telle de nos voisines géographiques, et que ça nous sort naturellement du jeu de la matrice, celle de Jakobson, celle que j’en spécifiais à l’instant ».

Dans un second temps, en « positivant » au maximum, on aura la paraphrase suivante du même passage : « La langue française n’a pas le droit de ( me ) retoquer le bout d’ onomatopée que je lui injecte EN PLUS de celles qu’elle contient DEJA parce que, comme ces dernières, mon bout d’ onomatopée est formé avec les phonèmes du système phonématique de la langue française ( même si Lacan nous dit penser que certains phonèmes de l’onomatopée qu’il a forgée peuvent se trouver dans une autre langue « de telle de nos voisines géographiques ». Peut-être pense-t-il à l’allemand UR (l’Italie et la France sont « voisines » de pays de langue allemande) ? ourdrome donnerait alors UR d’Rome : le premier (discours) de Rome, le (discours) originaire de Rome. Ou bien URdrome, le champ, la piste originaire. La piste, le sillon originaire : disque URdrome ? ) ».
Dans ce passage que j’ai paraphrasé Lacan dit quelque chose de très simple et très banal à savoir que ce qu’on dit dans une langue, en l’occurrence la française, peut s’entendre de plusieurs manières selon les regroupements de phonèmes choisis. On peut dire par ailleurs que l’emploi qu’il fait, en cette occasion, du mot
« onomatopée » est discutable, mais ce n’est pas le lieu de le discuter.

Je pense que ma dernière paraphrase clarifie pleinement le sens de ce que veut dire Lacan et explicite son emploi du verbe retoquer. La forme « me retoquer » utilisée par Lacan (« retoquer quelqu’un ») est assez rare. L’exemple le plus ancien que j’en ai trouvé est en Normandie au XIXe siècle : DELBOULLE, Gloss. de la vallée d’Yères, le Havre, 1876, p. 294 retoquer, accueillir quelqu’un en l’accablant de reproches…
Alors donc, je pense avoir complètement justifié ma proposition de transcription et je pense que vous les transcripteurs (et tous les lecteurs de « cette Troisième ») devraient en réécoutant l’enregistrement sans pré - entendu, entendre, comme moi, ceci : « ce n’est pas qu’elle ne soit en droit de me retoquer i nia pas d’onomatopée etc. », pas la moindre trace du « qu’ ».
Bien cordialement à vous
Henri Brevière

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message
  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

  • Lien hypertexte

    (Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d’informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)