Cher Patrick Valas,
Merci pour l’énorme travail que constitue la création et la maintenance de votre site.
A propos des traductions de Lacan par B.Fink, j’avais en 2008 eu avec lui ce court échange, à propos d’une erreur de traduction que, tout enclin d’indulgence à l’égard de ce Monsieur, je lui signalais comme « pas énorme », mais qui est en réalité un contresens.
Je ne sais pas s’il y a eu une réimpression de l’ouvrage, et si l’erreur (et éventuellement d’autres) a (ou ont) été corrigée (ou corrigées).
Voici entre deux lignes d’astérisques la remarque que je lui ai exposée. Il m’a répondu en me remerciant et en disant qu’il en tiendrait compte lors d’une prochaine impression. Comme je peux m’en passer, je n’ai pas suivi l’affaire, c’est-à-dire que je n’ai pas vérifié si une nouvelle impression avait été publiée, ni si le cas échéant elle avait été effectivement amendée.
Je ne joins pas la copie verbatim de la réponse du Dr Fink, souhaitant ne pas confondre une simple réponse de politesse avec un engagement.
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Dear sirs,
Please excuse my bad English.
I’d be much obliged if you’d follow this mail to Dr Bruce Fink, author of ’Lacan to the letter’.
……………………………………. a letter to Dr Bruce Fink ……………………………
from :
Jacques Echavel
psychanalyste
25 impassse B Louis Galvani
69100 Villeurbanne
France
Dear Dr Bruce Fink,
As I am not so good at speaking and writing English, I will switch to French, wich you undoubtedly read better than I write English.
Après avoir lu les ’reading seminar I and II, then XI and finally XX,’ qui m’ont beaucoup intéressé, notamment vos présentations et contributions, j’ai souhaité me procurer vos travaux, parmi lesquels ’Lacan to the letter’.
J’ai eu le tort de commencer par la préface, alors qu’on devrait plutôt lire une préface après avoir lu le corpus du livre, et je suis tombé en arrêt sur ce qui me semble être une erreur dans votre critique des premières traductions de Lacan en anglais.
En effet, pages VIII et IX vous corrigez très justement « try to expose » par « strive to get the analysand to guess ».
Mais ensuite vous écrivez « …to guess his own hand », c’est-à-dire deviner sa propre ’main’ (ou son propre ’jeu’)(**). Or dans le texte de Lacan, auquel je me suis reporté aussitôt, il s’agit de faire deviner à l’analysant la main de son partenaire, c’est-à-dire du quatrième :
Citation : ’ …le quatrième qui… et dont…’ . L’écriture de Lacan est parfois un peu difficile à lire, vous le savez mieux que personne, mais là en l’occurrence c’est sans ambiguïté ni fioritures : les deux pronoms relatifs représentent le substantif ’quatrième’. Il faut donc lire ’… le quatrième …, dont l’analyste va, par ses coups s’efforcer de lui faire deviner la main : …’. Ici ’lui’ représente ’l’analysé’ (évoqué plus haut dans le paragraphe), que Lacan, à cette période de son œuvre, n’appelle pas encore ’l’analysant’. Il s’agit donc pour l’analyste de s’efforcer de faire deviner à l’analysé (’lui)’la main de son partenaire (’dont’).
Globalement l’erreur n’est pas énorme : car, pour l’analysé, la main de son partenaire est le jeu de signifiants de l’inconscient en ce qui le concerne(*) : son propre jeu dans la main de ce qui, de lui, n’est pas lui. Et c’est presque la même chose que sa propre main. Il aurait suffi pour cela que Lacan ait écrit ’jeu’ au lieu de ’main’.
Votre précision sur la position opérante de l’analyste comme objet a, et non la position de ’Monsieur je sais tout’, reste donc toujours aussi valide.
J’ai cependant souhaité vous faire part de cette remarque de lecteur intéressé, puisque vous proposez une lecture ’à la lettre’, et que dans ce cas on ne peut pas se contenter de globalité. De plus, je ne vous apprendrai rien si je mentionne l’importance du ’quatrième’ en d’autres lieux de l’œuvre de Lacan.
Merci en tout cas de vos travaux de diffusion de l’œuvre de Lacan dans le monde anglophone.
Sincerely yours,
Jacques Echavel
(**) en français ’main’ et ’jeu’ sont pratiquement synonymes en ce qui concerne les jeux de carte : avoir une belle main, c’est avoir un bon jeu.
(*) je crois qu’il convient d’éviter de dire SON inconscient, car il n’y a pas de lien de propriété entre la personne et l’inconscient.
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Les traductions du Dr Fink ne me semblent donc pas indispensables, sauf à considérer qu’un petit rien dans la lecture de la traduction, « quelque chose qui cloche » en quelque sorte, peut titiller suffisamment l’oreille du lecteur pour l’inciter à se reporter à original - report tout spécialement indispensable lorsqu’il s’agit d’un texte aussi épistémologiquement articulé que celui de Lacan. C’est d’ailleurs l’usage que je fais des traductions de Lacan en langues étrangères, dont la lecture constitue pour moi d’abord un délassement, puis peut-être un affûtage de ma lecture.
Bien à vous,
Jacques Echavel
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