L’homme aux pantoufles du bois de Fausses-Reposes.
Pour Monsieur Lacan,
De la part de Soury Pierre, 5 rue du Dahomey,
75011 Paris, téléphone : 367 52 93
Monsieur,
J’aimerais faire une psychanalyse avec vous.
J’aimerais venir vous voir pour ça.
S’il vous plait, est ce que vous voudriez bien me recevoir ?
Depuis plusieurs mois, je suis venu plusieurs fois au 5 rue de Lille, et Madame Gloria m’a dit que ce n’était pas possible, ou pas possible pour le moment.
Pierre Soury
Soury-Lacan
Pierre Soury, brillant mathématicien, ancien élève de l’École Polytechnique, chercheur.
Élève de Jacques Lacan, qu’il a secondé pendant les 7 dernières de son enseignement (1973 -1980). Lui permettant d’accomplir son « Odyssée Borroméenne ».
Désespéré, par l’interruption de son séminaire. Ne pouvant jamais obtenir de la secrétaire de Lacan, de l’avoir simplement au téléphone, décide de mettre fin à ses jours le 2 juillet 1981.
Le journal :
« Mort mystérieuse dans le bois de Fausses-Reposes.
Le cadavre d’un inconnu, découvert hier, vers 16h. 30 par une patrouille de gendarmes de la brigade de Versailles, dans le bois de Fausses-Reposes, constitue une énigme pour les enquêteurs.
L’homme, de type européen, châtain, de quarante à cinquante ans, ne montrait aucune trace de blessure.
Par contre, fait étrange, il était démuni de pièces d’identité, bien qu’il soit possesseur d’un ticket de train Paris-Chaville et d’une somme de 150 F en coupures de 50 F.
Correctement vêtu, coiffé et rasé de frais, il portait cependant une paire de pantoufles. Les gendarmes estiment qu’il est mort vingt-quatre heures auparavant à l’endroit où ils l’ont trouvé. H. Pradenc ».
« Versailles : l’inconnu découvert dans le bois de Fausses- Reposes c’est empoisonné.
Il s’agit sans doute d’un suicide !
Mais faute d’avoir pu mettre un nom sur le cadavre découvert vendredi après-midi dans le bois de fausse repose à Versailles les gendarmes de la section des recherches continuent leur enquête.
L’autopsie pratiquée hier matin a, en effet, confirmé que l’homme avait avalé des produits toxiques.
Des flacons vides portant l’inscription « toxique 1 », « toxique 2 », « toxique 3 » étaient en effet retrouvé dans les poches de l’inconnu démuni de tout document pouvant permettre son identification.
Qui est-il ?
Que faisait-il à cet endroit limitrophe de Versailles et de Ville-d’Avray ?
Pourquoi s’est-il donné la mort ?
Pour l’instant, ces questions restent sans réponse.
Âgé de 45 ans environ, l’homme qui mesure 1 m 70 et de corpulence moyenne.
Au moment de sa découverte, il était vêtu d’une chemise rayée rouge, violet, Orange, sous un imperméable genre chaos et de couleur verte et d’un pantalon beige.
Au pied, il portait une paire d’espadrille bleue marine sans chaussettes.
Il avait avec lui un sac marron contenant une veste saharienne beige clair, une carte routière des environs de Paris ainsi qu’un paquet de cigarettes et une paire de ciseaux.
Un ticket de train Paris Montparnasse-Chaville-Viroflay rive gauche composté le 2 juillet à 8h.15 permet de supposer que l’inconnu était venu effectuer une randonnée dans notre région."
Le désespéré de Fausses-Repose un drame de la solitude
« Je suis lasse de vivre seul ».
J’ai décidé de mettre fin à mes jours.
C’est par des lettres envoyées à sa famille et à un ami que René Soury, ingénieur polytechnicien de 39 ans avait fait part de ses intentions suicidaires.
René Soury brillant chercheur au CNRS réputé pour ses travaux vivait seul dans un appartement, 5, rue du Dahomey, à Paris
Cette solitude lui pesait.
Elle l’a tué.
Son corps a été retrouvé, vendredi après-midi à Versailles, dans les bois de Fausses-Reposes, en limite de Ville-d’Avray.
L’homme dont nous avions donné le signalement dans notre édition du 7 juillet, était vêtu d’un imperméable genre car loué et d’un pantalon beige.
Il avait aux pieds des espadrilles sans chaussettes.
La découverte dans ses affaires, de flacons portant l’indication « toxiques », laissait supposer que l’inconnu, dépourvu de tous ses papiers d’identité, s’était suicidé.
L’analyse a révélé que l’homme avait avalé du cyanure, un poison particulièrement violent, que ses fonctions au CNRS lui avaient permis de se procurer ».
La dissolution de l’École Freudienne de Paris, le 5 janvier 1980
Que se passait-il en Lacanie, en cette époque post-dissolution de l’École Freudienne De Paris ?
La guerre menée par son « bout-d’oulm » (composés d’universitaires non-analystes, et pour certains pas du tout, même encore aujourd’hui pas-analysés du tout) contre les étoiles psychanalystes de première grandeur de son école.
Les combats furent vraiment à la hauteur de cet événement planétaire, selon ses protagonistes, c’est-à-dire comiques.
La preuve, Lacan n’intervenait pas, il « était dans le travail de l’inconscient » (sic).
Il semble bien que Lacan était KO, mais debout titubant.
Ces analysants dont moi, le trouvaient dans une forme olympique, jusqu’au 8 septembre 1981, « il était mort » le 9, et « il ne savait pas » – c’est dire que ça existe l’amour de transfert.
Jamais, jamais la « famille », n’a eu le courage de dire la simple vérité, pour ses analysants d’abord.
Il fallait l’obliger à arrêter sa pratique.
L’homme était terrorisé par ses analysants. Pour se défendre il devait en boxer les plus lucides, avec les autres comme moi, j’en ai témoigné ailleurs, il pouvait dormir en paix.
Nous n’avons jamais rien su.
Même sa propre fille Sybille Lacan, ma belle-sœur, qui ne l’avait pas vu depuis un an, il l’avait foutue à la porte.
Elle-même, son frère Thibaud, et leurs neveux, fils de Caroline, décédée tragiquement quelques années auparavant, ont appris la disparition de leur père et grand-père, deux jours après sa mort.
Ils ont été conviés à sa mise en terre par leur demie sœur Judith, pour les obsèques.
Patrick Valas 26 juin 2012

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